Apprendre à entendre Lean

X — C’est sympa de me parler Lean de temps en temps. Et même de m’inviter à des conférences ou à des ateliers épisodiquement. Mais vraiment je n’en peux plus du vocabulaire japonais tout le temps.

Moi — Malheureusement on ne peut pas faire l'impasse : le Lean a été inventé et affiné au Japon, tout au long de son développement industriel, au sein d’une entreprise en particulier, Toyota.

X — N’empêche qu’à chaque conférence ou webinaire, je dois me farcir un nouveau mot sans traduction. J’ai eu droit à kaizen, puis andon, puis jidoka. Pour ceux que j’ai retenus… Je suis certain que j’en ai oublié en route. Ah si, le dernier en date était « Genchi Genbutsu ».

Ce qui sort de la bouche
Ce qui sort de la bouche

Moi — Sans oublier « Hoshin Kanri » ou « Nemawashi ».

X — Arrête, je suis déjà perdu : c’est dommage, je sens pourtant bien qu’il y a des trucs intéressants dans le Lean.

Moi — Je te propose de faire un pas de côté : est-ce que tu sais que presque tous les sodas en grand surface sont « kasher », en particulier aux Etats-Unis ?

X — Quel rapport ?

Moi — Je vais y venir… Nassim Nicholas Taleb appelle ça la tyrannie de la minorité : quand la majorité est indifférente à un sujet, une minorité exigeante peut imposer ses préférences assez facilement à toute une population. Et par ailleurs une minorité trop conciliante se fondera dans la masse, tandis qu’une majorité sensible bloquera toute évolution.

X — Et tu penses que le Lean est une de ces minorités ?

Moi — Pas qu’un peu : dans le monde de l’entreprise, la pensée dominante se transmet à coups d’injonction financière et de court-termisme froid, grâce à des cohortes de détenteurs d’un MBA.

X — Et la question du vocabulaire serait une forme d’intolérance ?

Moi — Complètement assumée.

X — Tu veux dire que vous bloquez l’accès au Lean avec des mots japonais de manière délibérée ?

Moi — « Bloquer » est un peu excessif. C’est surtout un moyen de préserver l’essentiel : les spécificités du Lean. Tiens par exemple, le « Karakuri » : au départ c’est une petite poupée qui bouge toute seule, grâce à la gravité et à des systèmes ingénieux. C’est désormais un axe majeur des efforts de Toyota sur le chemin de sa propre décarbonation : chaque année il y a des compétitions internes avec des voyages au Japon pour les meilleurs. Les connotations d’un mot comme « marionnette » ou « poupée » rendent le concept difficilement abordable en France sans le détour par le mot japonais.

X — Mais pourquoi tout le temps et partout ?

Moi — Tu oublies le fameux « Just-in-Time », inventé par les japonais eux-même parce que ça « sonnait » bien. Puis détourné en pas-de-stock-chez-moi par des consultants, oubliant l’intérêt du stock tampon et négligeant les pertes de compétence.

X — Je sens que je ne vais pas réussir à te faire changer d’avis.

Moi — Tu bosses dans le développement logiciel, est-ce que tu te fais autant de tracas avec les « commits », « mock objects » et autres « pull requests » ?

X — Tu triches : c’est le vocabulaire d’une très large majorité de développeurs à travers le monde.

Moi — N’empêche que si tu veux devenir développeur, tu dois apprendre ces mots-concepts.

X — Tu veux dire qu’il faut accepter de redevenir débutant pour faire du Lean ?

Moi — Cela ne m’étais jamais apparu aussi clairement, mais maintenant que tu le dis, oui ! Trois fois oui même. C'est même l'intérêt principal que j'y trouve.

Et le mur devient un partenaire de réflexion

X — Tu continues à utiliser des feuilles de papier au mur !? Je pensais pourtant que dans une boîte de logiciels qui promeut la dématérialisation des procédures RH - entre autres - il y avait mieux à faire.

Moi — Je te rassure : ici chacun fait autant de télétravail qu’il le souhaite. On peut dématérialiser autant que nous le souhaitons. Nous avons ainsi deux formes de Gemba que nous faisons régulièrement en ligne et en binôme, le « Gemba code » et le « Gemba kaizen ».

X — Mais alors pourquoi ne pas mettre en ligne ces feuilles ?

Moi — Parce que ces feuilles-là sont d’abord pour moi, quand je prends un temps du recul et de réflexion avec moi-même.

X — Décidément je ne comprends pas : si tu es le seul à les utiliser, ça pourrait tout simplement être un fichier Excel sur ton ordinateur personnel. Même pas besoin de cette couche de complexité qu’on appelle Zoom, Miro, Teams et peut-être bientôt Metaverse.

Moi — Petit hic : prendre du recul derrière un écran est littéralement impossible. Tu seras toujours à 60 cm des pixels lumineux. Je préfère largement pouvoir embrasser tout le mur d’un seul regard et m’avancer au besoin pour explorer une feuille en particulier. Je vais même jusqu’à écrire à la main les résultats que je collecte dans nos différents outils numériques.

X — Dois-je comprendre que tu aimes bien perdre ton temps à utiliser tes petits feutres vert et rouge ?

Moi — Et même le Tippex ! Dans le cas présent, c’est moi qui met les points sur les courbes et qui en efface certain avec du correcteur blanc : l’effet Ikea joue aussi sa part.

X — Un peu comme un tennisman qui joue contre le mur alors : la trajectoire de la balle ne dépend que de son coup initial.

Jouer au tennis avec un mur de briques

Moi — Effectivement, je n’avais pas pensé à cette métaphore : je m’y retrouve en tout cas. En fait le mur et ces feuilles sont mon espace matériel de Hansei : ce moment d’auto-réflexion pour tenter de comprendre ce qui s’est passé, l’accepter et trouver des ressources pour l’améliorer.

X — C’est marrant que tu aies besoin d’une zone bien physique pour réfléchir : j’aurais cru que tu pouvais faire ça devant ton écran. Un informaticien est plutôt équipé pour ça n’est-ce pas ?

Moi — Et bien non, mes meilleurs moments devant un écran sont plutôt quand je code en pleine concentration. On appelle ça être dans la « zone » mais c’est plutôt que le code coule de source, les doigts tapent plus vite que la pensée, le monde extérieur n’existe pas. L’auto-réflexion, c’est au contraire une bonne tranche de réelle qu’il faut examiner, évaluer et digérer. Ce serait trop facile de l’évacuer en refermant l’ordinateur.

L'apprentissage nécessite un vrai problème et du temps pour soi

X — C'est curieux : tu as l'air de tenir énormément à la formation au sein de ton équipe, mais d'après ce que j'ai compris, un seul d’entre eux aurait suivi des sessions « officielles » de formation depuis presque un an.

Moi — C'est parce que l'apprentissage réel implique un vrai problème et du temps pour soi. Si le problème n’est pas réel, la formation ne servira qu’à briller en société, et pas à autre chose : tu n'apprendras rien.

Session d'aikido à Lambersart (France)

X — Mais pour apprendre, il y a sûrement de la valeur dans les répétitions des tâches au quotidien : je pratique l'aïkido depuis deux ans, et je peux te garantir que nous faisons les mêmes techniques encore et encore. J’ai même l'impression de m'améliorer.

Moi — J'imagine que tu as changé de point d’attention au fil des ans : peut-être que c'était les mains et les bras au début, et peut-être les pieds ou les hanches maintenant.

X — C'est vrai : notre sensei semble toujours avoir un truc différent à montrer pour chacun d'entre nous. Pour moi, il s'agit généralement de me rapprocher du uke. C’est d’ailleurs assez incroyable : il sait vraiment repérer les petits détails dans la pratique de chacun.

Moi — Et ces étapes qu’il te suggère de travailler chaque semaine, sont-elles de plus en plus difficiles à mettre en pratique ?

X — Je vois où tu veux en venir : chacune peut effectivement être déstabilisante. Quand il met quelque chose de nouveau dans ma tête, tout devient plus difficile et j’ai souvent l’impression de régresser alors que j’essaye juste d’incorporer ce nouveau paramètre dans mon geste. C'est vraiment dur. Mais de temps en temps, il y a un déclic et le mouvement se met en place.

Moi - C'est le vrai problème auquel je voulais en venir : dans le monde du business, il y a aussi des tonnes d’étapes à franchir les unes derrières les autres. Doubler le bon et diviser par deux le mauvais est une bonne étape pour plonger dans le Lean.

X — Est-ce l'ambition que vous fixez à vos collaborateurs ?

Moi - Au fil des ans, j'ai découvert que de tels objectifs chiffrés pouvaient être très intéressants pour l'équipe technique. Et que même, « on va jusque zéro » était encore meilleur.

X — N'est-ce pas décourageant ?

Moi — C'est la raison pour laquelle nous limitons habituellement nos efforts de kaizen dans le temps chez No Parking : après un an, chacun est libre de s'attaquer à un nouveau problème épineux. Bien sûr il peut aussi reprendre le même kaizen s’il le souhaite.

X — D'accord : je commence à comprendre cette notion de « vrai problème ». Mais peut-on revenir sur la partie « temps pour soi » : je pensais que le Lean était vraiment une question de travail d'équipe.

Moi - C'est là que mon rôle de manager prend toute son importance. D'abord, je m'assure que chacun a bien le temps de travailler sur son kaizen. Je fais un gemba avec chacun d'eux toutes les trois semaines : c'est une façon de montrer que je me soucie d'eux, d'applaudir leurs derniers succès et de les inciter à aller de l'avant. Et bien sûr, ils doivent - et peuvent - prendre du temps entre chaque gemba pour travailler sur les points durs qu’ils débusquent au fur et à mesure : c’est là qu’ils apprennent. Ensuite, une partie du processus d'apprentissage consiste à réaliser tu as besoin de l'expertise des autres pour construire la vôtre. Chacun découvre qu’il peut s'appuyer sur les connaissances de quelqu'un d'autre pour faire avancer son kaizen : la confiance se met en place quand ton collègue accepte de faire un truc qui te débloque. C’est là que le travail d’équipe émerge à son tour.

X — Je suppose que c'est le concept de nains se tenant sur les épaules de géants issu de l'univers académique.

Moi — Exactement, c'est là que la magie opère : lorsque tu sais que d'autres personnes veillent sur toi pendant que tu tentes de nouvelles choses pour répondre à de bons problèmes.

X — Parce qu’il y a de bons problèmes ?

Moi — En Lean, chaque problème est un cadeau : il faut apprendre à les accueillir avec délicatesse, délectation, dessein et détermination. Ce sont mes 4D. Il y en a d’autres.

Plus d'infos via Kanbans.net

No Parking recrute en design web : rejoins l'aventure en alternance

Cette offre d'alternance n'est plus disponible. Léa a rejoint l'équipe de No Parking en tant qu'apprentie graphiste en septembre 2022 😉

Qui sommes-nous ?

No Parking, startup lilloise, développe et commercialise des logiciels web comme par exemple :

  • Opentime – gestion du temps
  • Fissa – gestion de pointage
  • Lozeil – pilotage de trésorerie
  • Kanbans.net – gestionnaire de tâches en mode Lean

Ces logiciels permettent à des entreprises en France et à l’étranger de gérer leur activité sur des dimensions RH, financières et opérationnelles.

Ils sont commercialisés à plus de 200 clients et plus de 7000 utilisateurs en France et dans le monde entier (Europe, Etats-Unis, Chine, Japon, Inde, Brésil).

Quelles seront tes missions ?

C'est pour accompagner ces projets (puis les nouveaux) que nous recherchons un ou une apprenti(e) en « design web / UI / UX ».

Intégré au sein du pôle développement, tu participeras activement à toutes les étapes non-techniques de l'édition des logiciels et de leurs support de promotion (brief marketing, conception des interfaces, coordination technique, mise en place des actions de communication).

Quel profil est recherché pour cette alternance ?

Nous recherchons une personne qui maîtrise les outils graphiques liés au web (exemple suite Adobe, Sketch, Figma et/ou Affinity Designer) et qui a une appétence pour les nouvelles tendances du marché et une forte orientation utilisateur.

Les petits plus pour augmenter ses chances ?

  • des notions de mise en page avec HTML & CSS
  • de l’appétence pour l’ergonomie web et mobile
  • des compétences en création vidéo
  • un bon niveau en anglais

Et les détails pratiques ?

Type de contrat : Apprentissage

Période : 1 an minimum à partir de septembre 2022

Nous sommes une équipe dynamique de 6 personnes basée à Lille et plus précisement à Euratechnologies !

Et si on en apprenait plus sur... le lead time chez No Parking ?

Qu'est-ce que le lead time ?

Dans l'univers Lean, le Lead Time ou délai d'exécution est « le temps qui s'écoule entre le début et la fin d'un processus » et chez No Parking, il est au coeur de toutes nos actions !

En quoi le lead time agit sur nos manières de travailler seul ou à plusieurs et que permet-il chez No Parking ?

La réponse, en vidéo !

Une vidéo réalisée par Chloé Philippot, chez No Parking, avec la participation de Laury Henneton, Perrick Penet et Chloé Philippot

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